Interconnexion alpine entre tourisme durable et mobilité


J’ai eu l’occasion de participé 2 jours au voyage d’étude sur le Tourisme Durable organisé par l’association CIPRA dans le cadre du réseau Alliance dans les Alpes.

Tourisme durable

Voyage d’étude A la découverte du tourisme de demain

Le voyage a tout simplement débuté à Grenoble mercredi 13 Septembre au matin.
Enfin, habitant au sud de la métropole grenobloise, mon voyage à moi a démarré la veille, car afin d’éviter un douloureux réveil (et la difficulté des transports en commun matinaux), j’avais prévu une étape chez l’habitant.
Un bon ami allemand/italien m’avait prévu un déliceux repas à base de spécialités bien de chez lui (bien qu’un peu remise à sa sauce), que nous avons fini de cuisiner ensemble. (par exemple une omelette italienne qui ne se fait pas à la poele comme en France mais au four, ça change tout !) Ainsi j’ai découvert quelques bonnes recettes dont les noms m’échappent après une courte nuit.

Réveil tout de même matinal, le RDV étant fixé à 6h45.
Nous embarquons dans des minibus loués auprès de Citiz (ex Citelib), le principal service d’autoportage en Rhone-Alpes, puis nous récupérons d’autres participants venus en train des Alpes du Nord.

Je guide notre pilote, François, qui vient de monter une association pour développer de la sensibilisation sur le goût, la santé et les terroirs.
Nous arrivons alors à Vallouise à l’heure pour le démarrage du programme proprement-dit de ce voyage, avec une cinquantaine de participants venu des Alpes (françaises principalement) de diverses horizons. (élus de communes, communautés de communes, offices du tourisme, parc des écrins, associations,…)

-Une matinée animée par un chercheur pour nous titiller sur la notion de développement durable associé au tourisme et nous présenter des exemples plus ou moins durables et originaux. Nous ne définirons pas vraiment le tourisme durable : Tourisme durable, car permettant de durer dans le temps ? durable car permettant d’assurer une économie en bonne santé ? Durable car permettant aux habitants des territoires de continuer de bien vivre sur leur territoire? Durable car se préoccupant d’environnement ?
C’est un peu tout cela, mais lorsqu’on discute du sujet, on se rend compte que chacun choisit souvent un des aspects pour justifier son projet sans  prendre en compte l’ensemble des enjeux.
Personnellement, je trouve que permettre de péréniser les ressources du territoire est crucial (donc de ne pas gaspiller l’environnement et les ressources naturelles afin de pouvoir subvenir aux besoins futurs… comme le procclamait le rapport Brutland) et devrait toujours primer sur le reste.

-Un atelier pour réfléchir à ce qui nous parait important de proposer dans le tourisme de demain (qui se construit dès aujourd’hui !), heureux de constater qu’il y a de nombreux points de convergence avec mes voisins, on se sent moins seul !

-L’après-midi, un débat mouvant nous a permis de faire ressortir les enjeux, les contradictions des différents points de vue et postures des acteurs concernés : comment faire une synthèse (mais faut-il la faire !) entre le tourisme business, le tourisme de l’écolo utopiste, le tourisme que veut déployer un office du tourisme à l’échelle de son territoire, le tourisme tel qu’il est mis en oeuvre par les « socio-professionnels ». Ou faut-il réinventer les postures de ces acteurs ?
Se mettre dans la peau de l’autre (à l’aide un petit jeu de rôle par ex), devrait sans doute être un exercice à faire avant de prendre toute décision. Dans tous les cas, cet atelier pousse à vouloir travailler en prenant en compte les particularités des différentes parties prenantes.

-Une visite d’un camping de Vallouise en mode plutôt bien intégré à son environnement (chalets en bois démontables, tentes avec poêles à bois,…), le côté écolo est aussi décliné dans la vie du camping : on pose sa voiture au parking et on porte ses bagages à l’aide d’une carriole, le tri des déchets tu feras,…

-Une visite de la maison du parc des Ecrins, avec une particularité, l’accessibilité aux personnes handicapés et notament mal-voyantes , grâce à des maquettes shématisant le relief : la maquette pour comprendre les glaciers est particulièrement réussie (pour les voyants aussi !).
Puis un agent du parc nous présente plus en détail la marque Esprit Parc, lancée récemment.
Cette marque (que l’on peut voir aussi comme un label) permet de valoriser les produits des Ecrins, qu’ils soient à déguster, fabriqués ou des propositions d’activités et de sorties de découverte de la montagne.

-Une visite de Vallouise : car oui, connaitre son territoire est une vraie valeur ajoutée pour y développer du tourisme. Tant de curiosités peuvent être découvertes, encore faut-il qu’il y ait des passeurs pour qu’elles deviennent richesses. Un habitant nous présente ainsi le village, son église et également un vieux moulin avec des roues horizontales, qu’il a découvert il y a quelques années. (les roues et une partie du moulin étant ensablés)

Bref, une longue journée qui s’est conclue par un bon repas, et une nuit dans un gîte particulièrement chaleureux, bien pensé et aménagé : on s’y sent bien, et en plus on a réfléchi aux économies d’énergies.

Le lendemain, après un dialogue en conférence entre les principaux acteurs du territoire (Pays du briançonnais, Office du tourisme, Communauté de communes,…), nous avons découvert des expériences touristiques plutôt innovantes menées actuellement ou en projet :

-une vallée étroite (autant italienne que française) qui attend l’électricité depuis 15 ans sans réussite, et qui veut développer un projet d’autonomie énergétique

-des échanges paysans qui contribuent au développement des circuits courts et à la consommation de produits du terroir

-des professionnels qui ouvrent leurs portes pour faire découvrir leurs métiers

-un projet pour renforcer les mobilités entre communes et favoriser le développement d’un tourisme endogène, c’est à dire pratiqué par les habitants du territoire eux-même… qui sont en fait nombreux à ne pas le connaître (parfois pour des raisons financières, de mobilité, ou encore de culture)

-et donc ce projet pour faire revenir la bonne cuisine et les bons produits par la sensibilisation au goût et au terroir, en présentant des aliments parfois malconnus. L’occasion de goûter des sortes de tourtons revistés à la sauce graines d’épautre germées… Succulente !
Avec ça, François parvient autant à nous emporter dans le champ du paysan qui cultive l’épautre que dans sa cuisine.

Après un dernier repas à base de produits locaux, le programme doit se poursuivre en Italie.
Mais comme je dois être de retour dans la soirée sur Grenoble, mon voyage reprend lui la direction de l’Oisans.
Depuis Briançon, le stop est plus qu’une idée qui marche : à peine le temps de tendre le pouce que déjà je me retrouve dans une voiture : 2 saisonniers qui travaillent à Chamrousse. Il s’agit de saisonniers sédentaires puisque cela fait quelques années déjà qu’ils travaillent dans la station et ils ont choisi d’y vivre à l’année.
C’est intéressant d’avoir leur regard sur le tourisme tel qu’il le vive mais aussi leur vie en dehors du tourisme.
Je découvre par exemple que les bus du Grésivaudan montant à la station ont été à priori supprimés… Fini les sorties Chamrousse avec accès à 1€ ? Mais surtout, les habitants aussi doivent pouvoir bénéficier du développement d’un tourisme plus durable… si ce n’est pas avant tout aux habitants auxquels il faut penser avant de vouloir contenter à tout prix le touriste certes générateur d’argent et d’emplois.

Comme ils bifurquent sur Chamrousse, ils me déposent à Livet-Gavet, un spot plutôt adapté à la poursuite du stop (bien qu’il n’y a pas encore d’arrêt de Stop dans la vallée comme ceux déployés par Rézo Pouce, premier ,réseau d’autostop organisé) : en une minute, je suis à nouveau en voiture, cette fois avec un moniteur de ski de l’Alpe d’Huez. Là encore, les discussions tournent autour du durable, de l’énergie et des déplacements, la voiture électrique bonne idée ou pas ?, le vélo électrique, ça cartonne en ce moment, les panneaux solaires, le bilan est mitigé… et les stations ?
Bien sûr, son avis n’est pas celui que je partage (j’ai omis de lui préciser que je faisais partie de 2 associations d’environnement qui demandent aux stations d’arrêter de développer l’activité du ski et de terrasser les montagnes avec des pylônes et du béton) : son envie de voir maintenir son activité  et même de la développer, qui devrait passer par l’ajout de canons, de remontées, d’hébergements…son envie d’attirer toujours plus de monde. Etre pour un tourisme de masse ? Qui impacte fortement les milieux naturels ?
Mais après ces 2 jours qui permettent de reconsidérer les positionnnements de chacun, j’avais plutôt envie d’écouter, certes de tenter de comprendre mais surtout de respecter la vie d’un habitant du territoire, plutôt que d’argumenter.

Me voilà déjà Grenoble. Terminus tous les passagers descendent de voiture (plus qu’un tram et un bus)

Au passage, j’en profite pour me ravitailler dans une de mes boulangeries préférées proposant « une montagnarde » à base de farine du Trièves.

Le tourisme durable, c’était à la fois lent et rapide, intense et goûtu, ensoleillé et enrichisssant.

Notre production du groupe

En résumé : une monnaie locale pour promouvoir et développer les services et prestations des locaux (hébergements, cuisine et produits du terroir, activités,…), un territoire mis en valeur par son environnement naturel et ses cultures, accessible sans voiture afin de faciliter l’itinérance et la découverte de différents lieux du territoire, et un tourisme pour tous avec des tarifs adaptés.